France TélécomLe conseil de la concurrence, juge d'une saine organisation des marchés, vient d'infliger la plus lourde sanction de son histoire à France Telecom. L'opérateur écope en effet d'une amende de 80 millions d'euros pour abus de position dominante sur le marché de gros de l'ADSL. La juridiction reproche à l'opérateur historique d'avoir « fermé à ses concurrents, jusqu'en octobre 2002, l'accès au marché de gros de l'internet haut débit par ADSL » L'historique remonte à novembre 1999 : Neuf Télécom, qui se plaignait de certaines pratiques de France Télécom sur le marché de gros du haut débit, saisit le Conseil de la concurrence. Celui-ci, rapidement, demande à France Télécom de proposer une offre technique et commerciale permettant aux autres opérateurs « d'exercer une concurrence effective sur ce marché ».

En vain. Pour cette politique de l'escargot, le Conseil infligeait alors une amende de 20 millions, doublée devant la Cour d'appel de Paris.

Mais restait à s'intéresser au fond du dossier : et c'est là que le Conseil de la concurrence a décidé « au vu de la gravité des pratiques et de leur durée (1999-2002) », d'imposer à France Télécom une sanction de 80 millions d'euros. Le Conseil rappelle la situation alors : « du fait du monopole détenu par France Télécom sur les lignes de cuivre (la boucle locale) reliant les abonnés au central téléphonique, et de l'absence de dégroupage effectif jusqu'en 2002 de cette boucle locale », les concurrents étaient alors contraints d'acheter à France Télécom les prestations de gros.

Or, si France Télécom a bien accepté cette concurrence, ce n'était qu'à condition que les prestations utilisent, de bout en bout, ses installations (la célèbre option 5). Les opérateurs téléphoniques concurrents ne pouvaient en aucun cas utiliser leurs installations (option 3) et faire à leur tour des offres de gros aux FAI. Certes, la situation s'est un peu améliorée, puisque FT a bien accepté l'option 3. Toutefois, les tarifs pratiqués plaçaient la concurrence hors compétition, par rapport à l'option 5 de FT, lequelle restait seul en compétition. La situation a enfin évolué lorsque l'autorité des télécommunications a obtenu une baisse des tarifs, en septembre 2002.

Pour le Conseil, nul doute : « Ce refus d'accès à permis à France Télécom de rester l'unique offreur de prestations de transport du trafic Internet haut débit (ADSL) entre les abonnés et les FAI jusqu'en 2002, et a empêché l'entrée sur ce marché de concurrents potentiellement plus innovants et efficaces ». Pire encore, FT est restée totalement sourde aux différentes injonctions des autorités, rendant encore son sort aujourd'hui plus délicat. On évoque au passage une baisse de dynamisme sur ce marché innovant, et des conséquences dommageables pour toute l'économie, etc.

Notons enfin que la sanction de 80 millions aurait pu être encore plus lourde. Mais dans ce calcul de peine, le Conseil a retenu comme « facteur atténuant », les 40 millions déjà infligés à la société dans le passé sur ce même dossier.

Dans un communiqué, France Télécom rappelle que lors de la plainte, les modalités d'ouverture de ce marché n'étaient pas encore fixées, que l'option 3 n'existait pas davantage, alors que dès mars 2001, FT a suivi les données fournies par l'autorité de régulation (l'ART) sur ce marché. Et que la gamme d'offres de gros ADSL proposée par France Télécom à ses concurrents opérateurs et FAI « a été un facteur clé du développement du marché du Haut Débit en France » et non pas un boulet comme le ferait entendre le Conseil de la concurrence. France Telecom a donc décidé de faire appel de cette décision. Espérons pour la société que cet appel soit plus fructueux que le précédent...

Article écrit par Marc Rees publié sur le site PC INpact.